IV
POUR L’EXEMPLE

L’élégante berline marron traversa lourdement un pont en dos d’âne avant de s’engager à gauche sur la grand-route de Falmouth.

Richard Bolitho dut se retenir d’une main pour résister aux cahots. De profondes ornières faisaient tressauter les roues, de la poussière jaillissait sous les sabots des chevaux et jusque sous la voiture elle-même. Il voyait à peine le paysage qui se déroulait sous ses yeux, riche de mille nuances de vert, ponctué de taches blanches : les moutons paissant dans les champs qui bordaient l’étroite route en lacet. Il mourait de chaud dans son uniforme de parade ; son chapeau haut de forme lui rendait les brusques mouvements de la berline plus pénibles encore que s’il se fût trouvé dans un canot ballotté par le clapot. En fait, il n’était qu’à peine conscient de ce qui se passait.

L’amiral Thelwall était mort la veille dans la maison de Bolitho, pendant son sommeil. Il avait enfin trouvé un repos qu’il n’avait plus connu depuis des mois.

Lorsque le capitaine Rook leur avait appris la nouvelle à bord de l’Euryale, le vice-amiral Broughton avait déclaré :

— Je crois que son vœu était de rentrer à Norfolk. Vous devriez prendre les dispositions nécessaires, Bolitho.

Il avait affiché son petit sourire habituel :

— Mais peu importe, je pense que Sir Charles aurait voulu vous avoir avec lui pour son dernier voyage.

C’est ainsi qu’un petit cortège de voitures avait pris au pas le chemin de Truro, où la dépouille du frêle amiral attendrait de repartir pour un long périple jusqu’à l’autre bout de l’Angleterre.

Il était difficile de mesurer le degré de sincérité des regrets de Broughton. Il avait certes beaucoup à faire avec son nouveau commandement, mais Bolitho avait le sentiment que cet homme-là n’avait pas de temps à perdre avec ce qui n’était pas strictement nécessaire ni avec quiconque ne pouvait plus être tant soit peu utile.

La voiture fit une embardée ; il entendit le cocher crier des injures à une petite charrette tirée par un poney à demi hébété, pleine de poulets et de divers produits de la ferme, et dont le conducteur lança une volée de quolibets aussi vulgaires que bien sentis.

Bolitho se mit à sourire : il s’agissait sans doute de l’un des fermiers de son beau-frère. Il se rendit soudain compte avec terreur qu’il n’avait pas trouvé le temps, en quatre jours, de seulement apercevoir le beau-frère en question, pas plus qu’aucun de ses parents.

La voiture s’engagea sur une portion de route plus ferme, les trois derniers milles avant d’atteindre la mer. Il repensait à ces derniers jours si épouvantables depuis son arrivée et celle du nouvel amiral.

Il ne se souvenait pas d’avoir jamais rencontré quelqu’un comme Broughton, capable de paraître si détendu, alors qu’il avait un esprit vif-argent et semblait inaccessible à la fatigue.

Bolitho revoyait ce souper dans la grand-chambre. L’amiral tenait le dé de la conversation, s’adressant alternativement aux officiers présents et, s’il ne monopolisait jamais la parole, il savait faire sentir qu’il animait le débat.

Il n’était pas très sûr de bien saisir l’homme derrière le charme, le raffinement et l’aisance qu’affichait la plupart du temps Broughton.

L’amiral lui semblait inaccessible, et il savait pourtant qu’il essayait de se masquer la méfiance instinctive que l’homme lui inspirait. Il représentait un monde de privilèges, d’autorité indiscutée, monde auquel Bolitho n’avait guère accès et dans lequel il ne souhaitait pas pénétrer pour son compte.

Broughton ne faisait pas d’esbroufe lorsqu’il leur parlait de son hôtel de Londres, des personnalités qui venaient lui faire visite. Il ne s’agissait que de son mode naturel d’existence, de l’un de ses droits en quelque sorte.

Lorsqu’on l’écoutait à sa table, à bord de ce bâtiment qui roulait doucement sur son câble, tandis que passaient les vins fins, il était facile de se laisser convaincre que les décisions les plus importantes au sujet de la guerre contre la France et ses alliés chaque jour plus nombreux ne se prenaient pas à l’Amirauté, mais bien plutôt lors de réceptions que donnaient des demeures dans le genre de la sienne.

N’empêche, Bolitho n’élevait aucun doute sur sa compréhension des affaires politiques et de celles de la marine. Broughton avait participé à la bataille du cap Saint-Vincent, quelque trois mois plus tôt. Son aptitude à saisir les grandes lignes tactiques, à décrire de manière si réaliste le combat, en imposait vraiment.

Bolitho se rappelait encore le sentiment de jalousie, d’amertume qu’il avait ressenti en apprenant la victoire majeure remportée par Jervis. Il était condamné alors à des patrouilles épuisantes de blocus au sud de l’Irlande. Si l’ennemi avait tenté un débarquement sérieux, si l’Euryale et ses modestes conserves avaient réussi à le contraindre au combat, il aurait sans doute vu les choses différemment. En lisant avidement les comptes rendus successifs de victoire de Jervis, il avait encore mieux compris le bonheur que l’on doit éprouver lorsque l’on conduit deux escadres à se battre de front.

Le vieil amiral Jervis avait été fait chevalier de Saint-Vincent en reconnaissance de ce haut fait et un autre nom avait émergé, celui du commodore Nelson, qui semblait promettre beaucoup. Nelson, qu’il avait eu l’occasion de croiser rapidement au cours de la malheureuse aventure de Toulon, Nelson qui, plus jeune que lui de deux ans, était pourtant déjà commodore. Si Dieu lui prêtait vie, il pouvait espérer accéder rapidement aux plus hautes fonctions.

Bolitho n’éprouvait pas de rancœur à voir un officier de sa trempe recevoir une juste récompense, mais cela ne faisait que souligner un peu plus à quel point il était loin dans les eaux. Ou du moins, c’est ainsi qu’il le percevait.

Trois vaisseaux de ligne avaient rallié l’Euryale, des soixante-quatorze : deux frégates, dont l’Aurige, et une corvette. Toute cette petite escadre mouillée en bon ordre dans la baie de Falmouth avait fort belle allure. Il savait pourtant d’expérience que, une fois à la mer, dispersés dans un désert mouvant, ils paraîtraient beaucoup moins invincibles. Il était peu probable que les faibles moyens de Broughton fussent engagés autrement qu’à la marge dans des actions véritablement importantes.

Seule lueur d’espoir au cours de ces quatre derniers jours, Broughton avait fini par se ranger aux vœux et aux demandes de Bolitho pour ce qui regardait le sort de l’équipage de l’Aurige.

Le quartier-maître Taylor avait été incarcéré et serait sans aucun doute cassé de son grade. Le capitaine Brice et son second étaient toujours à terre, dans une caserne. A bord de la frégate, les choses s’étaient améliorées de manière saisissante. A l’exception du détachement de fusiliers qui lui était affecté et qui avait embarqué, il n’y avait plus de surveillance particulière à bord. Bolitho y avait dépêché Keverne pour prendre provisoirement le commandement jusqu’à la désignation d’un nouveau capitaine. Le fait que Broughton eût accepté ses demandes, en entérinant notamment le choix de Keverne, laissait assez bien augurer des chances de son second. Il pouvait enfin espérer un commandement pour de bon. Bolitho était désolé de le perdre si tel devait être le cas, mais ravi de le voir bénéficier d’une occasion aussi inespérée.

Les chevaux ralentirent en atteignant le haut de la dernière côte. Il voyait la mer et le port en contrebas, colorés comme sur une carte. L’escadre au mouillage, les allées et venues incessantes des embarcations de Rook, tout trahissait une activité intense, des préparatifs. Une fois en mer, il ne faudrait guère de temps aux capitaines pour se faire aux méthodes des autres ni à leurs bâtiments pour travailler à l’unisson, comme mus par la volonté unique de leur amiral.

Pourtant, leur destination, le rôle que l’on entendait leur faire jouer, tout cela était encore un mystère. Broughton en savait bien plus qu’il ne voulait bien le dire ou que ce qu’il lui avait même confié :

— Occupez-vous de préparer mes bâtiments, Bolitho. Je réglerai le reste dès que j’aurai eu des nouvelles de Londres.

Broughton lui faisait pleine et entière confiance pour tout mettre en bon ordre selon ses désirs. Les barcasses travaillaient du lever au coucher du soleil, apportant à bord du ravitaillement, refaisant les pleins d’eau douce, de cordages. Les bâtiments se répartissaient la récolte humaine moissonnée par les détachements de presse de Rook. L’amiral partageait son temps entre ses appartements et des dîners à terre avec les autorités locales qui pouvaient l’aider à équiper sa flotte.

Tout le malaise et la plupart des incertitudes qui avaient accompagné l’arrivée de l’Aurige à Falmouth s’étaient estompés. Bolitho était reconnaissant à Broughton d’avoir fait montre d’humanité et de mansuétude dans l’affaire. Ce qui s’était passé à Spithead ne devait pas se reproduire, à aucun prix. Il lui fallait y veiller, non seulement dans le cas de l’Aurige, mais également pour tout le reste de l’escadre.

Il prit son sabre posé sur la banquette et regarda plus attentivement au-dehors. La berline tressautait sur des pavés usés et s’arrêta enfin devant l’auberge qui lui était si familière, près de la jetée. Les chevaux fumants encensaient, impatients d’avoir leur ration et de se reposer enfin.

Il y avait quelques habitants sur la place, mais il fut frappé par la présence des tuniques rouges et par la tension ambiante. L’atmosphère n’était pas la même lorsqu’il était parti pour Truro avec la dépouille de Thelwall.

Book se précipita vers lui, visiblement très préoccupé.

— Qu’y a-t-il ?

Bolitho lui prit le bras et l’entraîna à l’intérieur de l’auberge.

Rook jeta un regard autour de lui.

— L’escadre du Nord. La mutinerie s’est étendue, et c’est l’ensemble de la flotte qui est aux mains des mutins ; ils se sont emparés des armes ! – il baissa d’un ton : C’est un brick de Plymouth qui nous a annoncé la nouvelle. Votre amiral est depuis lors d’une humeur de chien.

Bolitho se mit en route avec lui. Son visage ne laissait rien paraître, alors qu’il bouillait intérieurement.

— Mais comment se fait-il que nous ne l’apprenions que maintenant ?

Rook tirait sur sa cravate comme si elle le gênait.

— Une patrouille a retrouvé le cadavre du courrier de Londres dans un buisson, la gorge tranchée et délesté de sa sacoche. On aura su qu’il venait ici et on a voulu s’assurer que l’amiral Broughton serait maintenu dans l’ignorance le plus longtemps possible.

Il appela un marin qui se trouvait près de la jetée :

— Appelle-nous un canot, mon garçon !

Bolitho s’approcha du muret chauffé par le soleil pour examiner la rade. L’Euryale brillait dans la chaleur, l’équipage s’activait sur le pont et dans les hauts. Comment les choses pouvaient-elles évoluer si rapidement ? Tout était en ordre, et des hommes entraînés sombraient tout à coup dans la mutinerie ?

— Je ne sais pas, ajouta Rook en hésitant. Je ne sais pas s’il m’appartient de le dire, mais je crois que Sir Lucius Broughton a été très marqué par ce qu’il a vécu à Spithead. Ceux qui tenteront de lui désobéir à l’avenir risquent de le payer très chèrement.

Le canot accostait contre la jetée, Bolitho l’y suivit. Rook resta debout jusqu’à ce que Bolitho se fût installé dans la chambre, puis il fit signe au patron de rejoindre le vaisseau amiral.

— Espérons, fit lentement Bolitho, que nous allons prendre la mer sans tarder davantage. Il est plus facile de réfléchir calmement une fois que la terre est par l’arrière.

Il donnait le sentiment de penser à voix haute et Rook se tut.

La traversée jusqu’au trois-ponts dura ce qui leur parut une éternité. En approchant, il vit que les filets d’abordage avaient été gréés. Des fusiliers en nombre occupaient les passavants, la dunette et le gaillard.

Il escalada rapidement l’échelle, passa la coupée, se découvrit tandis que les sifflets retentissaient et que la garde présentait les armes.

Weigall, troisième lieutenant, lui dit rapidement :

— L’amiral vous attend, monsieur – il semblait mal à son aise. Je suis désolé que votre canot ne vous ait pas attendu au môle, mais nous avons rappelé toutes les embarcations à bord, monsieur.

— Merci, fit Bolitho.

Il essaya de dissimuler l’appréhension qui l’envahissait et se dirigea vers la pénombre de l’arrière. Il fallait qu’il eût l’air calme, normal, alors qu’il éprouvait exactement le contraire.

Lorsqu’il arriva devant la cloison de la chambre, trois fusiliers avaient remplacé l’unique factionnaire qui montait d’habitude la garde. Leurs mousquets portaient baïonnette au canon.

Serrant les mâchoires, il poussa la porte. Rook, la gorge sèche, respirait bruyamment tout à côté de lui et il découvrit les autres officiers qui l’attendaient.

Une table avait été installée en travers, des chaises disposées derrière le meuble donnaient à la chambre l’aspect d’une cour martiale. Les officiers qui se tenaient ainsi debout et en silence étaient les capitaines de l’escadre au grand complet, y compris le jeune commandant de l’Active, leur corvette.

Un jeune enseigne qu’il ne connaissait pas se précipita vers lui, avec un sourire dont on ne savait trop s’il était de bienvenue ou de soulagement à le voir enfin arrivé :

— Heureux de vous savoir de retour, monsieur – il lui indiqua la petite chambre des cartes de Broughton dont la porte était close. L’amiral vous attend.

Il sembla se rendre compte tout à coup que Bolitho ne bougeait toujours pas.

— Je m’appelle Calvert, monsieur, compléta-t-il comme pour s’excuser, le nouvel aide de camp de l’amiral.

Son élocution distinguée rappelait celle de Broughton, mais les similitudes s’arrêtaient là. Il paraissait exténué, perdu, et Bolitho se mit immédiatement en alerte. Pendant le peu de temps qu’il avait passé à Truro, à serrer la main des notables et à écouter leurs condoléances convenues, les événements n’avaient pas manqué. Il s’entendit répondre d’une voix sèche :

— Conduisez-moi, monsieur Calvert, nous trouverons plus tard le temps de faire les présentations officielles.

On étouffait dans la chambre ; Bolitho constata que les rideaux de claire-voie avaient été tirés, ce qui réduisait à rien l’aération.

Broughton se tenait debout près de la table, les bras croisés, les yeux fixés sur la porte, comme s’il était congelé dans cette attitude depuis une éternité. Sa vareuse était posée sur un fauteuil, sa chemise blanche était marquée de taches humides.

Très calme, le visage vide de toute expression, il salua Bolitho d’un geste avant d’ordonner sèchement à l’enseigne :

— Attendez dehors, Calvert.

L’officier, qui jouait nerveusement avec son manteau, murmura :

— Les lettres, amiral, je pensais…

— Seigneur, monsieur, êtes-vous donc aussi sourd que stupide ! – il se pencha sur la table. J’ai dit : hors d’ici !

La porte claqua sur le malheureux Calvert, totalement décomposé. Bolitho s’attendait que la colère de Broughton prît de l’ampleur, tant on eût dit qu’il s’était retenu jusqu’à la dernière seconde, jusqu’à son retour, et qu’il allait la subir de plein fouet.

Mais sa voix était étonnamment calme lorsqu’il reprit :

— Mon Dieu, je suis bien content que vous soyez enfin rentré – et, lui montrant une enveloppe ouverte sur la table : Enfin, l’ordre d’appareillage. Cet âne de Calvert l’a apporté de Londres.

Bolitho n’avait toujours rien dit, voulant laisser à Broughton le temps de retrouver sa sérénité. Il annonça calmement :

— Si vous l’aviez souhaité, amiral, j’aurais pu vous trouver un aide de camp dans l’escadre…

— Oh, la peste soit sur lui ! répondit tranquillement l’amiral, j’ai été contraint de payer une faveur que l’on m’a faite voici quelques années. J’ai promis à son père de prendre avec moi cet imbécile et de l’éloigner de Londres.

Il se détourna pour contempler le ciel bleu, la tête un peu penchée, comme s’il réfléchissait.

— Je suis sûr que vous êtes au courant des dernières nouvelles – sa poitrine était soulevée par la colère qui le reprenait. Cette racaille, ces misérables ont eu l’impudence de se mutiner, hein ? Toute la flotte du Nord est en éruption grâce à, grâce à… – il laissa sa phrase en suspens – … et voilà ce que donne votre fichue humanité. De la lâcheté, voilà comment je l’appelle, moi, votre humanité, et si vous croyez qu’ils ont le moindre respect pour ce qu’ils prennent pour de la faiblesse !

— Sauf votre respect, amiral, je crois qu’il n’y a aucun lien entre ce qui s’est passé sur l’Aurige et les troubles qui ont éclaté dans le Nord.

— Ah bon ? – sa voix était redevenue calme, trop calme. Je peux vous garantir, Bolitho, que j’ai déjà eu ma dose de trahison à Spithead. J’ai vu mon propre bâtiment pris d’assaut par une bande de salopards, hurlant, jurant, des menteurs. J’en suis encore humilié, j’en porte à jamais la trace nauséabonde qui me colle à la peau.

Quelqu’un frappa discrètement à la porte et le capitaine Giffard, qui commandait les fusiliers, annonça :

— Tout est paré, amiral.

Mais il se retira prestement en voyant le regard furibond de l’amiral.

— Puis-je vous demander ce qui se passe, amiral ?

— Vous pouvez.

Il prit sa vareuse sur le fauteuil, son visage luisait de sueur.

— A cause de vous, j’ai pris une décision qui allait contre mon propre jugement. A cause de vous, j’ai laissé les mutins de l’Aurige en liberté, je ne les ai pas fait juger.

Il fit volte-face, ses yeux jetaient des éclairs :

— A cause de vous, à cause de vos promesses de malheur, promesses que vous n’aviez ni le droit ni l’autorité de faire, j’ai dû les laisser impunis, ne serait-ce que pour préserver votre autorité de capitaine de pavillon !

Il criait à présent ; Bolitho s’imaginait la tête des autres, derrière la porte, ceux qui sympathisaient avec lui ou bien qui se réjouissaient de le voir rabaissé au même niveau que les autres. Bolitho ne les connaissait pas suffisamment pour se faire une opinion. Il savait une chose : l’attaque soudaine de l’amiral le remplissait d’amertume, de colère. Il répondit d’une voix dure :

— J’ai pris une décision, amiral, j’étais seul…

— Ne m’interrompez pas, hurla Broughton ! Bon sang, il aurait mieux valu que vous attaquiez l’Aurige et le réduisiez en pièces ! S’ils ont des officiers dans votre genre, à la flotte du Nord, alors, Dieu ait pitié de l’Angleterre !

Il se saisit de son sabre d’un geste brusque, le mit à sa ceinture en ajoutant :

— Eh bien, allons traiter la mutinerie qui s’est déroulée dans cette escadre !

Bolitho avait du mal à conserver un ton égal :

— Je regrette que vous n’acceptiez pas le jugement que j’ai rendu, amiral.

— Votre jugement ? – Broughton leva les yeux au ciel. J’appelle cela une reddition, moi.

Il haussa les épaules, prit son chapeau.

— Je ne peux pas revenir sur une erreur, mais par Dieu, je vais leur montrer que je ne tolère pas la moindre insubordination à bord de mes bâtiments !

Il ouvrit violemment la porte et s’avança dans la grand-chambre.

— Asseyez-vous, messieurs.

Il prit place au centre et fit signe à Bolitho de s’installer près de lui.

— Messieurs, j’ai convoqué cette cour martiale en vertu de l’autorité qui m’a été donnée et qui me confère des pouvoirs spéciaux tant que durera cet état d’exception.

Bolitho jeta un regard rapide aux autres et ne vit que des masques. Ils étaient sans doute encore interloqués par le changement subit du cours des événements et se demandaient à quelles conséquences ils s’exposaient désormais.

Broughton parlait comme s’il s’adressait à la cloison d’en face, du même ton uni qu’à son habitude.

— Le meneur de l’insurrection à bord de l’Aurige était un certain Thomas Gates, secrétaire du capitaine. On l’a laissé, comment dire, prendre la fuite et il est sans aucun doute également responsable d’autres morts, comme celle du courrier à qui l’on a dérobé les dépêches cachetées qui m’étaient destinées.

L’atmosphère était extrêmement tendue ; les bruits du bâtiment leur parvenaient comme étouffés, irréels.

— Le quartier-maître, poursuivit tranquillement Broughton – et, tout en jetant un œil rapide sur le papier posé devant lui : Un certain John Taylor, a été placé sous bonne garde pour conspiration. C’est le principal inculpé convoqué devant cette cour.

— Puis-je m’exprimer, amiral ?

Au son de cette voix, tous les visages se tournèrent vers Bolitho. L’espace de quelques secondes, il eut l’impression de les voir tous un par un, avec cette diversité d’expressions se reflétant dans leurs yeux : sympathie, compréhension, voire, dans un cas, amusement.

Il les chassa de ses pensées et poursuivit calmement :

— Taylor n’est qu’un parmi tant d’autres, amiral. Il est venu me trouver parce qu’il me faisait confiance.

Broughton se tourna vers lui et l’étudia d’un air lointain.

— Deux de ses camarades ont déjà déposé contre lui et ont déclaré qu’il faisait partie des meneurs, comme second de Gates.

Un éclair, de compassion peut-être, alluma furtivement ses yeux.

— Ils ont pu se sentir soulagés de voir Taylor déposer leur chef. Ils sont peut être également de bons et loyaux marins – sa bouche se durcit. Mais cela ne me regarde pas. L’escadre, voilà ce qui m’importe, et j’entends qu’elle remplisse sa mission sans que quiconque l’en empêche – il se tourna vers Bolitho : J’ai bien dit quiconque.

Et, tapant des poings sur la table :

— Amenez le prisonnier.

Bolitho réussit à ne pas bouger lorsque Taylor entra, encadré de deux fusiliers. Le capitaine Giffard, martial, suivait sur ses talons. Il était pâle mais calme, et son visage s’éclaira lorsqu’il reconnut Bolitho.

Broughton le fixa froidement.

— John Taylor, vous êtes accusé d’avoir conspiré pour organiser une mutinerie et de vous être emparé du bâtiment de Sa Majesté britannique l’Aurige. Vous êtes accusé avec une autre personne, qui n’a pas encore été interpellée, pour le même chef, et vous avez été appelé ici pour entendre votre sentence.

Il claqua des doigts en ajoutant :

— Votre trahison, en un temps où l’Angleterre lutte pour sa survie, dénote un homme sans honneur et sans foi. Vous qui êtes quartier-maître, qui avez reçu la confiance de vos supérieurs, qui avez été formé par eux, vous avez trahi cette marine même qui vous accordait vos moyens de subsistance.

Taylor n’en revenait pas. Il répondit d’une voix faible :

— Non, ce n’est pas vrai, amiral – il secouait la tête. Ce n’est pas vrai.

— Cependant, continua Broughton en se penchant en arrière et en contemplant les barrots, au vu de vos excellents états de service et de tout ce que mon capitaine de pavillon me dit de vous… – il se tut, voyant Taylor tenter de s’approcher, les yeux brillant d’un fol espoir. J’ai décidé de ne pas vous appliquer la peine maximale, peine qu’exigerait, à mon avis, votre cas.

Taylor tourna la tête, stupéfait et regarda Bolitho. De la même petite voix, il murmura :

— Merci, amiral, Dieu vous bénisse.

Broughton avait l’air passablement irrité.

— En lieu et place, vous êtes condamné à deux douzaines de coups de fouet et vous serez cassé.

Taylor hochait toujours la tête, les yeux pleins de larmes sous le coup de l’émotion, et répétait :

— Merci, amiral.

La voix de Broughton était tranchante comme une lame :

— Deux douzaines pour chacun des bâtiments rassemblés à Falmouth – un signe du menton : Emmenez le prisonnier.

Taylor ne dit rien, les fusiliers le firent se retourner et sortirent avec lui.

Bolitho ne pouvait détacher ses yeux des portes closes, de l’endroit vide où s’était tenu Taylor. Il avait l’impression que la chambre se refermait sur lui, comme si c’était lui et non pas Taylor qui venait d’être condamné.

Broughton se leva et dit simplement :

— Regagnez votre bord, messieurs. Vous prendrez connaissance des ordres que Mr. Calvert va vous remettre. La punition sera exécutée demain matin à huit heures, procédure réglementaire.

Tandis qu’ils sortaient derrière Calvert, Bolitho lui demanda d’une voix très calme :

— Pourquoi, amiral ? Au nom du ciel, pourquoi cela ?

Broughton regardait ailleurs, les yeux vides :

— Parce que j’en ai décidé ainsi.

Bolitho ramassa son chapeau, effondré devant la sévérité de la justice à la Broughton.

— Avez-vous d’autres ordres pour moi, amiral ?

Il ne comprenait pas lui-même comment il parvenait à rester maître de sa voix, à dissimuler à ce point ses vrais sentiments.

— Oui. Faites dire au capitaine Brice de reprendre le commandement de l’Aurige – il fixa Bolitho pendant plusieurs secondes. Je porte le poids des responsabilités, il faut bien que j’en aie également les prérogatives.

Bolitho croisa son regard et répondit :

— Si Taylor avait eu droit à une vraie cour martiale, amiral…

Il s’arrêta, comprenant soudain qu’il était en train de tomber dans le piège.

Broughton se mit à sourire doucement :

— Une vraie cour martiale l’aurait condamné à être pendu, et vous le savez fort bien. La sentence aurait été exécutée trop tard pour servir d’exemple, ce délai et cette preuve d’indulgence auraient été tout simplement gaspillés. La punition de Taylor servira de semonce et dissuadera cette escadre de tomber dans la mutinerie, au moment où elle en a le plus besoin. Il peut très bien y survivre, il en tirera gloire et pourra toujours vous en être reconnaissant.

Et comme Bolitho s’en allait, il ajouta :

— Je réunis tout le monde ici dès que la sanction aura été exécutée. Faites signaler à tous les capitaines de rallier mon bord – il détourna le regard. Mais je pense que je puis vous laisser organiser tout cela. Je suis invité à souper à terre chez une personnalité locale. Un certain Roxby, vous connaissez ?

— Mon beau-frère, amiral, répondit-il d’une voix glacée.

— C’est vrai ?

Broughton se dirigea vers sa chambre à coucher.

— Décidément, vous êtes partout.

La porte se referma derrière lui.

Bolitho se retrouva sur la dunette sans se souvenir d’avoir fait le trajet. Les ombres s’allongeaient, le soleil plongeait vers la pointe. Des matelots faisaient la pause sur les passavants. Sur le gaillard, un violon laissait échapper quelques notes plaintives. L’officier de quart passa de l’autre bord pour lui laisser l’espace réservé à ses promenades solitaires. Près des chantiers, deux aspirants se pourchassaient en riant et commencèrent à grimper dans les haubans du grand mât.

Bolitho posa les mains sur le pavois et resta là à fixer sans ciller le soleil qui prenait des teintes orangées. Mais ce soir, il n’arrivait pas à retrouver la paix. Où qu’il se tournât, il revoyait le visage de Taylor, cet air pathétique de gratitude lorsqu’il avait écopé de douze coups, puis l’horreur quand il avait entendu la suite. Taylor devait être à présent à fond de cale, il entendait les éclats de rire des aspirants, la triste mélopée du violoneux. Peut-être l’homme jouait-il à son intention ? Si c’était le cas, le cruel exemple que voulait faire Broughton avait déjà manqué son but.

Il se tourna vers l’Aurige qui oscillait doucement sur son câble. On pouvait penser que le châtiment de Taylor n’était qu’un pis-aller, qu’il valait mieux punir un seul homme que beaucoup. Sans l’initiative de Bolitho, ils auraient tous subi le fouet, pour ne pas dire plus. Et sans lui, le bâtiment aurait très bien pu passer à l’ennemi.

Mais l’on pouvait également juger à l’inverse que, quelle que dût être l’issue, la justice maritime n’atteindrait jamais son but en faisant fouetter des boucs émissaires. Bolitho savait bien que Taylor appartenait à cette catégorie, et cela le remplissait de dégoût.

 

Bolitho, les yeux dans le vague, contemplait sans y faire attention le paysage dévoilé par les fenêtres de poupe. Allday entra :

— Tout est paré, monsieur.

Et sans attendre la réponse, il prit le vieux sabre au râtelier accroché à la cloison, le retourna entre ses mains, frotta un peu de sa manche la garde ternie.

— Vous avez fait de votre mieux, fit-il enfin, vous n’avez aucun reproche à vous adresser.

Bolitho leva les bras pour permettre au gros maître d’hôtel de boucler son ceinturon et de fixer le sabre, puis les laissa retomber. A travers les verres épais des fenêtres, la ville dansait doucement dans le lointain, au gré des mouvements de l’Euryale soumis au vent et à la marée. Il prit soudain conscience du silence qui était tombé comme une chape sur le bâtiment depuis que Keverne était venu au rapport : les entreponts étaient dégagés et il était près de huit heures.

Il prit son chapeau, jeta un bref coup d’œil à sa chambre. Voilà qui eût fait une belle journée pour abandonner la terre. Une petite brise de suroît s’était levée au cours de la nuit, l’air était pur et vif.

Il soupira, sortit de sa chambre, passa près de la table où le petit déjeuner était posé, intact, franchit la porte flanquée d’un factionnaire rigide comme une statue et se dirigea vers le rectangle éblouissant qui menait à la dunette.

Keverne l’attendait, le visage impénétrable. Il salua avant d’annoncer :

— Dans deux minutes, monsieur !

Bolitho le regardait, l’air grave. Si Keverne ruminait toujours au sujet du commandement qui venait sans doute de lui échapper, il n’en montrait rien. Et s’il se préoccupait de ce que ressentait son capitaine, il le cachait bien.

Bolitho lui fit un signe de tête et se dirigea d’un pas lent vers le bord au vent où l’attendaient les officiers. Un peu plus sous le vent, les officiers mariniers et les aspirants, alignés de façon impeccable, ne bougeaient qu’au gré des mouvements du bâtiment.

Il jeta un regard sur l’arrière : les fusiliers de Giffard se tenaient en travers, tuniques rougeoyant au soleil, baudriers blancs et chaussures impeccablement cirées comme d’habitude.

Il se retourna, s’avança lentement le long de la lisse, laissant ses yeux errer au hasard sur les marins rassemblés, qui le long des passavants, qui dans les embarcations ou les haubans, tous s’attendant au drame imminent. Leur silence disait éloquemment à quel point l’atmosphère était lourde. Tout endurcis qu’ils étaient à une discipline sévère et à ce genre de punition, on sentait qu’en l’occurrence elle les révoltait.

Huit coups tintèrent à la cloche du gaillard. Les officiers se raidirent en voyant arriver Broughton avec le lieutenant Calvert.

Bolitho salua mais ne dit pas un seul mot.

Le mouillage trembla au départ du coup de canon puis le roulement lugubre des tambours commença. Il aperçut sous le décroché de dunette le chirurgien qui discutait à voix basse avec Trebutt, le bosco, et ses deux aides, dont l’un portait le célèbre sac de toile rouge. L’homme baissa les yeux en sentant sur lui le regard de son capitaine.

Broughton tapotait discrètement la garde de son superbe sabre en cadence avec les tambours, l’air calme et détendu comme à son habitude.

Bolitho se raidit en voyant un aspirant s’essuyer la bouche du dos de la main, geste qui réveillait en lui un mauvais souvenir mal cicatrisé.

Il n’avait que quatorze ans lorsqu’il avait assisté lui-même à sa première séance de fouet devant la flotte. Il ne se souvenait guère que d’un mélange de larmes et de nausée, mais ce cauchemar ne l’avait jamais vraiment quitté. Au sein d’une marine où le châtiment du fouet était fréquent, accepté et pour l’essentiel justifié, le spectacle qui allait se dérouler était largement le pire, aussi dégradant pour la victime que pour ceux qui y assistaient.

— Nous lèverons l’ancre cet après-midi, Bolitho, nota négligemment Broughton. Nous allons à Gibraltar où je recevrai de nouveaux ordres et des nouvelles fraîches – il leva les yeux vers sa marque et conclut : Une belle journée pour appareiller.

Bolitho regardait délibérément ailleurs, essayant de chasser de ses oreilles le battement lancinant des tambours.

— Tous les équipages sont complétés, amiral.

Il se tut, Broughton le savait aussi bien que lui, c’était juste pour dire quelque chose. Pourquoi diable ce qui allait arriver devait-il gâcher tout le plaisir ? Il aurait dû comprendre depuis longtemps que les jours heureux où il commandait une simple frégate étaient à jamais révolus. Dans ce temps-là, visages, hommes, tous étaient pour lui marqués du sceau de l’individualité. Lorsque l’un d’eux souffrait, tout le monde souffrait avec lui. A présent, il lui fallait se résoudre à ne plus les connaître un par un. Ce n’étaient que des objets consommables, comme l’artillerie ou le gréement, l’eau potable, le parquet du pont sur lequel il se tenait.

Il se savait observé par Broughton, et tourna délibérément la tête. Non, tout cela avait de l’importance, il s’en souciait, il ne changerait pas. Il ne changerait certainement ni pour Broughton ni pour augmenter ses chances d’être promu au sein d’une marine qu’il aimait toujours autant, dont il avait de plus en plus besoin.

Il entendit Keverne se racler la gorge, puis quelque chose qui ressemblait à un soupir dans les rangs des hommes massés sur le passavant.

De l’avant du Zeus, le soixante-quatorze le plus proche, émergea une lente procession de chaloupes, une par bâtiment. Les avirons s’élevaient, se baissaient, au rythme de la batterie de tambours. Celle de l’Euryale occupait la seconde position, vert foncé comme ceux qui étaient saisis dans leur chantier, plein d’hommes silencieux. Chacune des embarcations avait son contingent de fusiliers, dont les tuniques rouges et l’éclat des armes ajoutaient une touche colorée à ce sinistre spectacle. La procession entama un large virage pour se diriger vers le vaisseau amiral.

— Cela ne devrait plus prendre très longtemps, fit nonchalamment Broughton.

— Ce sera bien assez long !

 

La chaloupe de l’Aurige s’approcha du bord, crocha dans les cadènes, tandis que les autres restaient aux alentours pour assister à la punition.

Bolitho prit le Code de justice maritime des mains de Keverne et s’approcha à pas pressés de la coupée. Spargo, le chirurgien, était déjà descendu dans la chaloupe avec les aides du bosco et il leva les yeux en voyant l’ombre de Bolitho tomber sur les nageurs.

— Paré pour la punition, monsieur.

Bolitho se contraignit à avancer encore, jusqu’à voir la forme allongée à l’avant de la chaloupe. Recroquevillée, les bras attachés sur une barre de cabestan, comme un crucifié. On avait du mal à reconnaître Taylor. L’homme qui était venu implorer son secours, qui lui avait demandé le pardon et… Il enleva sa coiffure, ouvrit le Code et commença à lire les articles, le chef d’accusation, la punition.

En bas, dans la chaloupe, Taylor remua un peu et Bolitho s’arrêta pour le regarder de nouveau.

Les bancs et le fond étaient couverts de sang. Pas de ce sang qui coule au combat, non, un sang noirâtre. Noir comme les lambeaux de peau qui pendaient de son dos déchiqueté. La chair noire était si labourée que les os découverts brillaient au soleil comme du marbre poli.

Le bosco leva les yeux et demanda de sa grosse voix :

— Deux douzaines, monsieur ?

— Faites votre devoir.

Bolitho se recoiffa et garda les yeux rivés sur le deux-ponts le plus proche comme l’homme levait le bras. Le fouet retomba avec une force terrible.

Il entendit quelqu’un s’approcher de lui.

— Il semble supporter fort bien la chose, fit Broughton.

Il n’y avait aucun signe d’intérêt dans sa voix, aucun intérêt réel. Non, il se bornait à constater.

Puis tout fut consommé, très rapidement. La chaloupe reprit sa tournée jusqu’au bâtiment suivant. Bolitho vit Taylor tourner la tête, il essayait de le regarder, mais il n’en eut pas la force.

Bolitho se détourna, écœuré par le spectacle de ce visage torturé, de ces lèvres fendues, ce qui avait été autrefois John Taylor.

— Faites rompre, monsieur Keverne, fit-il brutalement.

Et involontairement, il se retourna vers la procession qui venait de se reformer. Encore deux bâtiments, il n’y survivrait pas. Un homme jeune, peut-être, mais certainement pas Taylor.

Broughton était encore là, tout près.

— S’il n’avait pas été sous vos ordres, dans le temps… euh, c’était bien l’Hirondelle, n’est-ce pas ?… vous ne vous seriez pas senti si impliqué, si vulnérable.

Voyant que Bolitho ne répondait pas, il ajouta sèchement :

— Il fallait faire un exemple. Je crois qu’ils ne l’oublieront pas.

Tendu à se rompre, Bolitho lui fit face et répondit d’une voix calme :

— Moi non plus, je n’oublierai jamais, amiral.

Ils se défièrent du regard pendant de longues secondes avant de céder. Broughton conclut :

— Je descends. Signalez à tous les capitaines de rallier immédiatement.

Et il s’en fut.

Bolitho essaya de se vider l’esprit, il ne ressentait que colère et dégoût.

— Monsieur Keverne, dites aux aspirants de quart d’envoyer le signal : « Tous les capitaines à bord. »

Keverne le regardait d’un air étrange.

— Quand cela, capitaine ?

Une voix les héla :

— Signal du Valeureux, monsieur. Le prisonnier est mort au cours de la punition.

Bolitho fixait toujours Keverne :

— Vous pouvez le faire hisser dès maintenant.

Et se détournant, il prit le chemin de sa chambre.

 

Capitaine de pavillon
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